dimanche 11 mai 2014

Critique #12

Pierre Rival, Où vont les hirondelles en hiver.



Dans vos librairies le 15 mai 2014.

            Russie. Hiver 1941. Les Allemands sont aux portes de Moscou. Tania Smirnova, dix-huit ans à peine, vit avec sa famille dans un appartement communautaire de la capitale. Le régime stalinien est sans pitié. La chasse aux traîtres et aux déserteurs est menée avec zèle et violence. Après avoir vu son amoureux mourir sous ses yeux, son voisin se faire arrêter pour vol à main armée, et son père se pendre en raison de ses origines allemandes, la jeune femme décide de s'engager dans l'Armée Rouge. 
            C'est ainsi qu'elle se retrouve nettoyeuse sur le front, à dépouiller les cadavres ennemis de leurs vêtements, de leur argent, de leurs souvenirs. Foutue pour foutue, il faut maintenant survivre à la guerre totale. Impossible de faire marche arrière. Petit à petit, elle parvient, de mal en pis, à se trouver une situation « confortable ». Elle rencontre Emile, un officier français rattaché à l'Etat-Major russe. Coup de foudre. Le garçon fait tout pour la garder auprès de lui. Mais qui est-il vraiment ?


« Il dormait comme un béat. Moi, sous lui, j'ai commencé alors à me torturer. Avais-je eu raison de céder ? Repu, un homme n'est plus tout à fait le même. La question m'a tenue éveillée toute la nuit. Des fois, je le haïssais. Puis, je me rappelais ses mots, les derniers mots qu'il m'avait glissés dans l'oreille avant de s'endormir : Ia tibia lioubliou...
Et je me rassérénais. Un peu. Parce que « je t'aime », tout de même, ce n'est pas une phrase qu'on lâche à tout le monde. C'est une déclaration qui engage. Enfin, je crois. »


            Ce livre nous permet de mettre en lumière le destin tragique des femmes-soldats, trop méconnu selon moi. Lorsque l'on parle de la Seconde Guerre mondiale, on pense aux camps de la mort, à Hitler, aux Allemands, aux hommes morts au combat, mais connaissez-vous ces Russes qui ont combattu comme des hommes pour défendre leur patrie ?
            L'écriture est franche et sincère, parfois rude, à l’image du personnage principal qui nous conte son histoire. Tania incarne la souffrance d'un peuple, la famine, le froid. On en apprend beaucoup sur le contexte de guerre. Les populations de l’arrière ne vivaient pas. Leurs vies étaient en sursit. Un point de vue original : celui d'une jeune femme courageuse, au caractère bien trempé. 
            Enfin, ce que j’ai trouvé le plus intéressant et le plus enrichissant, ce sont les différences de points de vue. Lorsque Tania traverse les pays de l’Est et se retrouve confrontée au regard des Polonaises, on ressent tout l’enjeu politique entre les peuples, résultat des différents raciaux alimentés par les pouvoirs. On se met à la place d’une exilée, qui tente en vain de se faire accepter par les autochtones, de comprendre leurs us et coutumes, mais qui sans cesse se fait rejeter, mépriser…
            Un beau livre qui nous plonge en Russie à ses heures les plus noires de la Seconde Guerre mondiale. Des secrets qui nous tiennent en haleine tout le long de la lecture, jusqu’à leur éclosion finale. Une histoire d’amour à rude épreuve.